samedi 31 octobre 2009

ARKONA "Goi, Rode, Goi !" (2009)

Encore une grosse année pour Arkona, qui après le DVD live Noch Velesova, sort son cinquième opus. Et c'est cette fois le premier album édité directement par Napalm, alors que Sound Age s'occupera de la licence pour les pays russes (le monde à l'envers, j'vous jure). La bande à Masha a encore mis les petits pieds dans les plats pour proposer un CD bourré ras-la-gueule de son folk metal tonique. Vous en aurez pour quatorze titres et 80 minutes de musique, difficile de faire mieux (même si quelques instants de bruitages permettent de remplir le CD intégralement). Mais évidemment, bien vautré dans votre siège de bureau avec une bière posée sur votre bide, vous exigez surtout de la qualité. Et on va y venir.

Au lieu de la ribambelle d'instrumentistes traditionnels invités pour l'occasion, le groupe a cette fois investi dans un ensemble à cordes qui remplace les parties de synthé habituelles. Le synthé avait bien été enregistré dans un premier temps, mais Arkona n'a pas hésité deux secondes à le remplacer après avoir écouté l'ensemble professionnel. Comme à l'accoutumée, un chœur féminin vient également appuyer la performance haute en couleurs de Masha. Et comme d'habitude, des invités se lèvent et se bousculent, avec cette fois une impressionnante armada de chanteurs.

Les vocalistes d'Heidevolk, de Menhir, de Skyforger, d'Obtest, de Månegarm apportent leur contribution et leurs textes à la pièce-maîtresse de l'album, "Na Moey Zemle" ("Dans mon pays"). Ce morceau épique de plus d'un quart d'heure raconte la quête du bonheur d'un voyageur au travers des pays d'Europe avant de constater que ce qu'il recherche ardemment est évidemment d'être auprès de son peuple dans son pays natal. Véritable pivot de l'album, le titre propose une multitude de thèmes et un voyage monumental à travers l'univers coloré d'Arkona. Fort et mélancolique, "Na Moey Zemle" mérite à lui seul l'écoute de l'album. Mais les autres plages ne sont pas en reste.

Si l'album connaît un démarrage un peu difficile (je ne suis pas convaincu par l'ouverture avec "Goi, Rode, Goi!"), Masha pose rapidement ses cartes sur la table et fait vibrer la tristesse de l'âme slave. En unique compositrice, elle livre des riffs énergiques (p'tain, le démarrage death de "Kolo Navi" déménage) autant qu'elle pose des atmosphères d'après-combat excellentes. Là où le plus dispersé Ot Serdtsa K Nebu m'avait quelque peu laissé sur ma faim, Goi, Rode, Goi! se concentre plus sur ces instants de grâce et de beauté mélodique. L'album alterne le fouet et la plume, le dynamique et le doux, pour nous téléporter avec talent dans les steppes battues par les vents. Comment résister à l'appel envoûtant d'"Arkona" et ne pas se saisir de ses armes pour aller secourir la citadelle? Masha parvient même à transformer le thème oumpa-oumpa d'un "Pamiat" en une composition de bravoure noble et épique. Et chaque morceau s'avère une fenêtre ouverte sur des temps immémoriaux dans une lointaine contrée.

Avec une nouvelle fois Lazar aux manettes, la production est encore une fois un modèle du genre, avec une lecture parfaite de toutes les couches d'instruments. La batterie sonne un peu trop synthétique à mon goût, mais ça passe encore. Masha est encore une fois en très grande forme. D'après elle, son enregistrement des voix, alors qu'elle était enceinte de huit mois, lui a donné une voix plus chaude et douce. Je vous laisse vous faire votre opinion sur le sujet. Elle m'a collé le frisson sur "V Tsepiakh Drevnet Tainy" et le très beau "Nebo Hmurde...", et m'a paru aussi énervée qu'à l'habitude dans ses grognements. Elle a aussi tenté des effets plus variés comme le refrain plus sirupeux de "Yarilo" (le septième titre) ou l'entrée en matière puissante du superbe "Liki Bessmertnykh Bogov". Du grand art, encore une fois.

Si Goi, Rode, Goi! va probablement être disséqué par les fans, je le prends comme une nouvelle invitation très réussie à fouler la neige russe en moonboots à poils (au pluriel. Je suis trop frileux pour le singulier). Arkona frappe une nouvelle fois un grand coup et nous met dans les étals un opus qui synthétise toute sa maîtrise du sujet. L'album démarre, on hoche la tête et on tape du pied de contentement. Que demande le peuple? Et si l'album ne peut atteindre les sommets de Vo Slavu Velikim à cause de quelques moments un peu moins forts, il s'inscrit d'emblée comme un poids lourd du folk metal cette année. J'ai adoré et vivement janvier à Paris. Slava! Et pis c'est tout! (Prince de Lu / VS Webzine)


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