vendredi 1 avril 2005

HEOL TELWEN - Interview (Avril 2005)


Après une démo sortie en 2003 (Mor Braz) unanimement saluée par la critique et une large partie des metalleux en tout genre, Heol Telwen nous revient encore plus fort avec leur premier véritable album (An Deiz Ruz). Entretient avec Kraban et Yskithyrwnn pour évoquer leur Celtic Folk Metal de premier cru (de cervoise évidemment).

Salut à vous, pour commencer cette interview, pourriez-vous faire un petit rappel historique concernant Heol Telwen ?
KRABAN : Salut à toi et aux lecteurs de Noz Pagan. Heol Telwen a vu le jour en 1999 et avait pour concept initial un black/death des plus classiques. Par la suite, ce premier projet musical pour nous tous s’est étoffé avec l’arrivée de nouveaux membres et c’est à ce moment que nous avons décidé d’aller plus en avant dans notre passion pour le Metal. Nous avons alors décidé de nous orienter vers une musique et un concept plus proche de nos aspirations culturelles et musicales. Nous avons de ce fait commencé à mélanger musique bretonne et Black Metal. J’ai moi-même commencé à jouer de la flûte et de la bombarde par souci d’authenticité, dans l’esprit de CRUACHAN, qui personnellement est une de mes influences principales. Par la suite, le line-up a un peu changé mais s’est équilibré autour de personnes dédiées à la cause Folk Metal. C’est sous le line-up actuel que nous avons enregistré Mor Braz, notre démo, en 2003, et An Deiz Ruz, notre premier album, fin 2004.

Quelles sont les influences majeures (philosophiques et musicales) des membres d’Heol Telwen ?
K : Musicalement, il est impensable de ne pas citer CRUACHAN et WAYLANDER. ADORNED BROOD et SKYFORGER ont aussi beaucoup contribué à nous forger une identité musicale propre. Il ne faut pas oublier non plus que le Black Metal des débuts comme Darkthrone, Burzum, Satyricon ou Emperor a beaucoup compté pour nous. Je dirais que notre palette d’influences est assez vaste et s’étend à peu près à tous les styles de Metal. La musique folklorique et médiévale à une place importante dans nos coeurs mais la liste serait trop longue. Philosophiquement parlant, il ne se cache aucune idéologie derrière Heol Telwen, simplement un respect des traditions et des ancêtres ainsi qu’une profonde admiration de la nature et de son oeuvre.
YSKITHYRWYNN : Heol Telwen fait la part belle aux légendes des terres possédant un héritage celtique, ce sont elles qui apportent le matériau de base de notre musique. A partir de là, nous tentons de les illustrer au travers des musiques que nous apprécions particulièrement : que ce soit la musique celtique à proprement parler, ou le Metal. Nous sommes aussi bien influencés par STIVELL, DENEZ PRIGENT, que par DARKTHRONE, KREATOR ou MAIDEN... L'association de ces styles nous apportant une palette assez vaste pour exprimer la complexité et l'émotion que dégagent ces mythes.

Vos influences celtiques et plus particulièrement bretonnes tiennent une place prépondérante dans votre musique. Peux-tu-nous en dire un peu plus à ce sujet ?
K : En effet, le jour où j’ai découvert la musique bretonne, par le biais d’Alan Stivell, cela a été une révélation pour moi, j’ai tout de suite su que cela jouerait un rôle important dans la musique d’Heol Telwen, d’ailleurs, le nom du groupe s’y prêtait déjà… La musique celtique, et plus particulièrement bretonne, nous livre une palette d’émotion très riche allant de la mélancolie des gwerz à la festivité d’une gavotte.

Donc tu aimes la musique folklorique celte en général. Tu apprécies donc aussi des groupes comme Try-Yann ou Dan Ar Braz ?
K : Oh que oui ! Pour te dire, nous avions un projet folk, Hades et moi, qui n’a pu se concrétiser faute de temps. TRI YANN est une influence majeure, tout comme STIVELL, BARZAZ, STORVAN ou encore CLANNAD. Personnellement, j’écoute autant de folk que de Metal.
Y : Bien entendu, la musique folklorique celte représente 50% d'Heol Telwen, il serait difficile pour nous de ne pas l'apprécier...

De plus en plus de groupes revendiquent une influence celtique que ce soit au niveau des paroles ou de la musique, quel est ton sentiment à ce sujet ?
K : C’est assez vrai, mais hélas, peu sont sincères et mélangent bien vite politique et «paganisme», ce qui au final renvoie une image négative du mélange des genres. La scène Folk Metal internationale et particulièrement française peut tout de même être fiers de groupes comme AES DANA, BELENOS, INIS GWENVA etc. qui sont d’excellents représentants de la culture celtique au travers du Metal.
Y : Si les groupes sont sincères dans leur démarche et leur musique, cela ne nous pose pas de problèmes, bien au contraire...Le problème étant que beaucoup de groupes utilisent cette culture et la déforment de façon plus ou moins dangereuse selon leur propre vision, sans se soucier d'une quelconque réalité... Les celtes sont un peuple vraiment méconnu, et nous pouvons t'assurer, que contrairement à l'idée reçue, ils étaient très loin d'Astérix ou des représentations romantiques que l'on veut leur attribuer notamment depuis le 19eme siècle...

Parlons musique maintenant. Votre démo (Mor Braz) est actuellement sold out. Heol Telwen semble donc avoir connu un départ plus que prometteur. Qu’en est-il (critiques, metalleux,...) ?
K : C’est vrai et nous en sommes très fiers, la majeure partie des critiques à été positive, excepté deux ou trois allergiques aux instruments folk (rires). De même pour la scène, nous avons eu la chance d’ouvrir pour CRUACHAN en Allemagne, et le public à été vraiment très réceptif à notre musique. En espérant que notre album satisfera le public ayant aimé Mor Braz…
Y : En fin de compte, nous pensons qu'elle a dû s'écouler aux alentours de 500 exemplaires, ce qui est vraiment une très bonne surprise ; beaucoup de gens nous la réclament encore! Dernièrement, j'ai même vu un exemplaire partir à un prix assez exorbitant sur « Ebay » alors qu'il ne s'agit que d'un vulgaire CD-R... Nous avons surtout été très étonnés de voir que la démo a vite dépassé nos frontières et s'est forgée une petite réputation à l'étranger, ce qui est vraiment très motivant et gratifiant!

Pour les fans de votre musique (dont je fais partie, question à moitié perso) aura-t-on un jour la chance de voir votre démo rééditée malgré le fait que trois des quatre morceaux de celle-ci soient sur le nouvel album ?
K : Alors là, je n’en ai aucune idée, c’est vrai que trois morceaux de cette démo sont présents sur notre premier album donc l’intérêt d’une réédition est limité. Nous avons une proposition pour un support vinyle, un support différent apportera un petit plus donc peut être que cela se concrétisera, reste encore à voir avec notre label…
Y : Pour ma part, je n'en vois pas trop l'utilité... Les titres seront disponibles sur l'album, même si leurs versions différent légèrement. Eventuellement, pourquoi ne pas la diffuser sur le site, deux titres y sont d'hors et déjà disponibles en téléchargement.


Parlons du nouvel album. Peux-tu nous le présenter (nom, lyrics,...) ?
K : « An Deiz Ruz » se compose de 12 titres pour une durée d’une heure. Le titre de cet album signifie « une aube rouge », à mettre en corrélation avec les lyrics du morceau titre, qui sont extraites d’un vieux poème breton daté du cinquième siècle, stigmatisant la christianisation de la Bretagne.
Y : Ce que je peux te dire, c'est qu'il est beaucoup plus abouti que notre démo que ce soit au niveau de la composition ou du son. Nous avons appelé plusieurs musiciens cessions (Bodhran, Oileann Pipe, Harpe, Violon) qui apportent vraiment une plus grande amplitude à notre musique...

Peux-tu nous en faire une description titre par titre ?
K : L’album s’ouvre sur un court instrumental nommé « An Douar Eleh m’on Ganet » (La terre où je suis né), et s’enchaîne sur « An Deiz Ruz », morceau assez épique tout en progression avec pas mal de choeurs. Ensuite, viennent « Dahud », tiré de la démo, et « Ar Korrigan Du », un titre très folk, comportant des échanges guitare/flûte/bombarde. Petite pause avec un interlude instrumental puis, mon morceau préféré je pense, Epona part1 et part 2, c’est presque une ballade, montant doucement en puissance avec violon et cornemuse irlandaise. Ensuite, il y a « Enez Glaz », déjà sur la démo, qui a tout de même été réarrangé pour cet enregistrement. Suit « Kan Ar Kern », morceau assez catchy et très folklorique, avec flûte traversière, violon et bombarde. Ce morceau est d’ailleurs en écoute sur notre site. « Son Ar Everezh », l’instrumental qui termine nos concerts puis « Heol Telwen » toujours de la démo, et l’album se termine sur « Ynis Witrinn », une douce mélodie de harpe et de flûte accompagné de coeurs.

Sur celui-ci, vous vous exprimez une nouvelle fois en breton. Ce choix, que je respecte beaucoup pour son intégrité, est-il le meilleur moyen de faire connaître Heol Telwen même si de plus en plus de groupes s’expriment dans leur langue natale (je pense à Moonsorrow par exemple) ou dans une langue régionale ou traditionnelle (comme Negura Bunget) ?
K : Nous ne cherchons pas à utiliser le Breton ou le gaélique à des fins publicitaires, nous essayons d’employer ces vieux langages au mieux simplement par souci d’authenticité et d’esthétisme, la prononciation de ces langues se marie très bien avec un chant black ou des choeurs.
Y : Les textes d' "An Deiz Ruz" sont en fait en 4 langues : Bretonne effectivement, mais aussi française, anglaise et gaélique... Chacune possédant ses propriétés intrinsèques. Je ne pense pas que ce choix soit une marque d'intégrité ou un moyen de se faire connaître, mais plus une démarche logique par rapport à notre musique.

Les membres d’Heol Telwen sont géographiquement assez éloignés les uns des autres, la plupart d’entre-eux ont pas mal de side-projects, cela ne doit pas faciliter le processus de composition et les répétitions ?
Y : Je crois que tu te trompes sur ce point, nous habitons tous en région parisienne, nous nous voyons donc assez régulièrement... Pour ce qui est des side-projects, ils sont au contraire un moyen de progresser dans le sens où ils nous permettent de ne pas rester cloîtrer dans un seul style musical et donc de faire de nouvelles expériences profitables à Heol Telwen.

Une tournée est-elle bientôt envisagée pour la sortie du nouvel album ?
K : Non, nous cherchons activement des plans concerts actuellement, rien n’est prévu hélas pour le moment. En espérant que la sortie de l’album nous servira de tremplin afin de jouer plus régulièrement.

De l’extérieur, on a vraiment l’impression que vous formez une sorte de clan avec Bran Barr, Nydvind,... L’appellation « tribu » est-elle de mise ?
K : Oui, ou « Clan », nous sommes tous réunis autours du mélange Folk Metal et c’est un milieu assez peu développé, donc les liens se créent plus facilement, qui plus est, la mentalité de ce milieu est tout de même nettement meilleure que dans la scène black pure et dure…
Y : Nous faisions même parti d'un collectif : "Anwynn" qui comprenait des groupes comme Bran Barr, Aes Dana, Forest of Souls, Apocryphal, Sword et Forge... Mais il n'est hélas plus à l'ordre du jour pour diverses raisons.

En tant que bon Gaulois, j’aimerais savoir quelles sont tes cervoises préférées (lol) ?
K : Perso… je suis un grand amateur des cuvées de la brasserie Lancelot… que se soit leurs bières ou leur chouchen, nous cherchons des sponsors… l’appel est lancé ;)
Y : Houlla, il y en a tant! Forcément les bières belges d'Abbaye forment le dessus du panier, mais nous avons également de très bonnes bières en France, notamment la Chti ou la Goudale...

Comme le veut la tradition de Noz Pagan, peux-tu te poser la question que tu aimerais que l’on te pose et y répondre si possible ?
K : J’aurais bien aimé… « avez vous prévu de jouer en Bretagne prochainement ? » je répondrais, hélas non, mais que c’est un de mes voeux les plus chers, donc si des Bretons lisant Noz Pagan sont intéressés pour nous faire jouer au pays, qu’ils nous contactent, la réponse sera oui !

Un dernier mot pour les lecteurs de Noz Pagan...
K : Merci à toi pour cette interview, et merci aux lecteurs de Noz Pagan pour l’intérêt qu’ils nous portent.


« O Sellet War Ar Mor... Ni Zo Enn Tan Hag Enn Anken »

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